Dans le Maine-​et-​Loire, Omerta autour de l’amiante

Dans l’education nationale l’amiante n’en finit plus d’être un scandale !

Ce lundi 4 mars a été diffusée sur France 5 une enquête de Vert de Rage intitulée “Amiante : l’école malade”*. Ce reportage très attendu a mis en en lumière les dysfonctionnements dont l’Éducation nationale et de nombreuses collectivités territoriales sont responsables.
Près de 30 ans après son interdiction, l’amiante n’en finit plus d’être un scandale sanitaire au sein de l’Éducation nationale.

 

*à revoir en VOD ici : https://www.france.tv/france-5/vert-de-rage/saison-4/5727153-amiante-nos-ecoles-malades.html

Dans le Maine-et-Loire, omerta autour de l’amiante

Cette réalité mise à jour par les journalistes est aussi celle à laquelle fait face SUD éducation 49 dans le Maine-et-Loire. Au cours de la campagne syndicale d’alerte sur la question de l’amiante dans l’Education Nationale menée depuis l’automne dernier, les militant-es de SUD éducation 49 se sont retrouvé·es confronté·es à une très forte opacité de la part des collectivités territoriales comme de l’Éducation Nationale.
Dans la quasi totalité des cas, les Dossiers Technique Amiante (DTA) qui sont l’outil indispensable au repérage de l’amiante dans les établissements ne nous sont pas communiqués et lorsqu’ils le sont, ils ne sont souvent pas à jour et comportent d’importantes incohérences. Pire encore, certains DTA établissent des recommandations urgentes qui ne sont pas suivies d’effets plusieurs années après. Ce n’est pourtant pas faute pour SUD éducation de rappeler systématiquement la réglementation en vigueur et de tirer la sonnette d’alarme.

La campagne de SUD education 49

SUD éducation 49 a donc adressé en octobre des demandes de consultation de ces DTA à tous les établissements du second degré du Maine-et-Loire ainsi qu’au Directeur Académique du Maine-et-Loire (DASEN) pour les écoles du premier degré. Celui-ci n’a pas daigné répondre, et nous n’avons reçu que 10 DTA sur les 70 collèges et lycées du département ! La plupart des DTA reçus ne sont pas conformes à la réglementation, et plusieurs d’entre eux préconisent des travaux pour mettre en sécurité les bâtiments, parfois depuis plus de 5 ans, sans que rien ne soit fait encore en 2024 ! Pire encore, certains DTA mentionnent des absences de bordereaux de suivi de déchets amiantés, ce qui signifie que des travaux ont eu lieu, mais que l’administration n’a pas respecté le suivi réglementaire des déchets. Dans quelles conditions des travaux de désamiantage ont eu lieu dans ces établissements ? La
question doit être posée !
Pour les écoles du 1er degré, SUD éducation n’a pas accepté le silence du DASEN et a saisi la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA), et celle-ci nous a donné raison ! Le DASEN a maintenant 1 mois pour nous communiquer tous les DTA des écoles du département. SUD éducation 49 veillera à ce que cette décision de la CADA soit respectée et ira jusqu’aux tribunaux s’il le faut !
Dans une autre saisine de la CADA effectuée par SUD éducation 49, la Rectrice de l’Académie de Nantes avoue ne pas être en possession des DTA des établissements du second degré de l’académie. C’est proprement scandaleux ! La Rectrice est responsable de la santé et de la sécurité de tou·tes les agent·es de l’éducation nationale et a obligation, de part le code du travail, d’assurer l’évaluation de tous les risques professionnels, y compris le risque amiante !
SUD éducation 49 a également obtenu le DTA de l’Université d’Angers. Sans surprise, de nombreux bâtiments sont amiantés, et les personnels ne le savent pas ! Les agent·es d’entretien et techniques sont les premièr·es touché·es par cette omerta et ce déni de nos institutions !

Préférant rejeter la faute sur les collectivités locales, l’Éducation Nationale, près de 30 ans après l’interdiction de l’amiante, n’est toujours pas capable d’établir la moindre cartographie précise de la présence d’amiante dans le parc scolaire.

Partout, l’amiante continue de faire des victimes, dans l’indifférence

Pendant que l’administration tergiverse, des centaines de personnels de l’Éducation tombent malades dans l’indifférence de leur employeur tandis que d’autres meurent dans le silence coupable des pouvoirs publics. Et que dire des conséquences d’une telle incurie sur nos élèves ? Peut-on concevoir que l’école, lieu dans lequel l’avenir s’imagine, soit aussi funeste ?

Rappelons que l’amiante est un cancérogène sans seuil, c’est à dire qu’une seule fibre peut suffire à rendre gravement malade celui ou celle qui l’ingère. Or avec 85 % des écoles et
établissements scolaires bâtis avant le 1er juillet 1997, date de l’interdiction de l’amiante en France et donc fortement susceptibles d’en contenir, l’Éducation nationale est particulièrement concernée par ce danger. La situation locale n’échappe pas à la règle et les établissements amiantés dans les Bouches-du-Rhône sont nombreux. Le chiffre avancé de 30 % est largement sous-évalué justement en l’absence de données fiables et clairement établies.
Les résultats de l’enquête réalisée par l’agence « Santé publique France » en 2019 ont de quoi faire froid dans le dos. Depuis 1997 environ 400 personnels de l’éducation auraient développé un cancer de la plèvre communément appelé cancer de l’amiante.

Faudra-t-il attendre 30 ans de plus pour que le ministère de l’Éducation, le gouvernement, le ministère de la santé, les collectivités territoriales daignent prendre à bras le corps ce sujet de santé publique primordial ? Sans mesures nationales fortes, les directions académiques (DSDEN), comme celle du
Maine-et-Loire, semblent désemparées.

L’action syndicale finit néanmoins par porter progressivement ses fruits et SUD éducation 49 réussit à obtenir petit à petit des DTA d’écoles et établissements.
Plutôt que d’enterrer les maigres tentatives mises en place ces dernières années comme l’a fait Jean-Michel Blanquer en 2020 en supprimant l’Observatoire de la Sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignements, organisme indépendant qui avait entamé un travail de recensement de la présence d’amiante dans le parc scolaire national.
Au rythme où vont les choses, et avec un délai de latence de certaines maladies, de 20, 30 ou 40 ans, le pire est devant nous. Si le Haut Conseil de la Santé Publique tablent sur
100 000 morts liées à l’amiante d’ici 2025 qu’en sera-t-il dans une dizaine d’années ? Si les pouvoirs publics estiment le coût du désamiantage trop élevé, qu’ils mesurent donc celui que représente leur inaction en soins et en vies humaines.
Car il s’agit bien ici de parler du désamiantage total. Nous le réaffirmons, face à toutes les tentatives de minimisation ou de déconstruction du risque, tant qu’il y a de l’amiante, il y a du danger, et ce danger n’est pas acceptable. À l’heure où des annonces sont pourtant faites sur la rénovation thermique des bâtiments, que la métropole dépense des fortunes en portails de sécurité, que rien ne soit prévu au sujet de l’amiante rend la situation d’autant plus intolérable.
L’enquête de Vert de Rage le montre très bien : non seulement l’Éducation nationale ne parvient pas à respecter la réglementation, mais celle-ci est elle-même dépassée. L’utilisation de prélèvements surfaciques, absents de la réglementation française actuelle, montre à quel point les outils de mesure à notre disposition ne sont plus à la hauteur. L’ANSES, comme la circulaire Lebranchu, plaident depuis plusieurs années pour un abaissement des seuils (0,5 fibre/par litre d’air au lieu de 5 fibres/litre d’air dans la réglementation actuelle) pour correspondre davantage à l’état des connaissances scientifiques.

SUD éducation donc a lancé depuis l’automne dernier une vaste campagne de lutte contre l’amiante dans les locaux de l’Éducation nationale et l’Enseignement supérieur. Celle-ci se traduit sur le terrain par l’organisation de formations syndicales et de réunions d’information et de sensibilisation des personnels, par l’outillage de nos collègues afin qu’ils et
elles puissent être vigilant-es et se protéger, par la collecte des DTA auprès de l’Éducation nationale et des collectivités territoriales ainsi que l’interpellation de l’administration de
l’Éducation nationale à toutes les échelles.

SUD éducation revendique

• la mise à disposition des documents prévus par la loi aux usagers et usagères, aux
personnels et aux organisations syndicales ;

• la mise à jour immédiate des dossiers techniques amiante avec des diagnostics de
qualité, et le respect du cadre réglementaire pour tous travaux ;

• le suivi médical pour l’ensemble des élèves, étudiant-es et personnels exposé-es, et
l’établissement de fiches d’exposition pour toutes les personnes concernées ;

• la mise sous abri des élèves, étudiant-es, personnels dans des locaux provisoires de
qualité, à l’écart des travaux ;

• la formation effective au risque amiante de tous les personnels ;

• la mise à l’ordre du jour dans les meilleurs délais du dossier amiante dans les instances
santé sécurité et conditions de travail des académies et des établissements du
supérieur ;

• la révision des normes en matière d’amiante, l’utilisation de nouvelles techniques de
mesures de la présence d’amiante et l’abaissement des seuils.